Notre histoire
Notre histoire
Il faut toujours viser la lune, car même en cas d’échec, on atterit dans les étoiles.
Oscar Wilde.
Notre histoire d’amour avec Loo.
Nous avons su que j’étais enceinte la fin de semaine de la fête des pères 2012. Notre enfant est décédé la fin de semaine des pères 2016. Quatre années inoubliables de purs « high » et intenses « down ».
Un enfant malade nous fait puiser des forces inconnues bien encrées dans nos tripes qui se présentent comme les situations se présentent. Sans prévenir tout peut devenir fatal et au moindre moment tout peut se transformer en un moment magique. Il faut que ça reste « le fun » jusqu’à la fin…Je me suis répété cette phrase durant 4 ans.
Ça m’aura pris plusieurs mois après le départ de notre enfant pour mettre par écrit ces dernières années si « le fun ». Et oui, nous avons eu du plaisir et nous continuons à profiter de la belle vie puisque nous sommes en santé!
Le petit Louis « Loo » est né en parfaite santé le 7 mars 2013.
Son papa est ingénieur et j’enseignais le français au secondaire. Loo a aussi une grande soeur Jade qui a 7 ans de différence avec lui…
Louis était le « petit zen » de la famille, il passait son temps à sourire et observer tout ce qui se passait devant lui avec des yeux curieux et grands ouverts. Il se promenait de bras en bras sans jamais broncher…
À trois mois et demi, lui qui faisait déjà ses nuits, il s’est mis à pleurer de pleurs inconsolables jusqu’à l’épuisement. Il voulait seulement être dans nos bras et sans mouvement. Au moindre balancement, il hurlait! Nous pensions alors qu’il faisait ses dents, ou bien qu’il digérait mal, ou qu’il avait faim, etc. Avec des cris stridents et les poignets serrés, il nous dévisageait d’un regard tourmenté…
Les rendez-vous se sont succédés avec sa pédiatre, les médecins discutaient souvent entre eux parce qu’ils trouvaient quelques petits trucs qui clochaient dans son développement par exemple, sa tête trop grosse, son sous poids, ou bien une pupille qui descendait sous sa paupière comme un coucher de soleil…Panoplies de tests et puis, c’est une fois tous les examens passés que sa pédiatre nous a révélé qu’il fallait attendre quelques mois avant de s’alarmer puisqu’après tout, l’ensemble de son développement semblait normal.
1 mois a passé. Louis avait maintenant 4 mois, il ne buvait plus! Ne dormait plus! Ses jambes et ses bras étaient toujours raides. Il criait de douleur en se tordant sur lui-même 22 heures sur 24. On nous a transféré d’urgence en neurologie…
Des images de son cerveau ont été prises et le diagnostique a tombé :
Louis souffrait d’une maladie neuro-dégénérative incurable, une leucodystrophie de type Krabbe.
Une leucodystrophie, c’est comparable à la SLA et à la Sclérose-en-Plaques par l’observation des symptômes. Horrible et hallucinant à regarder dégénérer…
Je vous rassure que nous avons eu une belle vie avec notre enfant malgré tout. Je me considère chanceuse de l’avoir connu en santé, et nous lui sommes reconnaissants qu’il nous ait choisis comme famille.
La maladie de Krabbe est une forme très agressive de leucodystrophie et la décente se fait très rapidement. En quelques semaines, les enfants perdent la faculté de sourire, de s’alimenter, de bouger et de suivre du regard. Progressivement, la maladie s’installe en laissant notre enfant pris dans un corps qui ne répond plus. S’en suit souvent d’horribles périodes d’épilepsie qui font mal. Louis pouvait faire plus de 30 crises par jour. Malgré l’atteinte, nous gardions le contact avec lui qui réussissait à communiquer avec de petits signes très discrets que seul l’entourage très proche pouvait comprendre : de petits sons sourds ou des battements de cils…Ces signes sont devenus si précieux et cela nous a fait comprendre toute la signification du terme « amour inconditionnel » et « vivre dans le moment présent ».
Lorsqu’on nous avait remis le diagnostique le 8 août 2013, Louis avait alors 5 mois et 1 jour.
On nous avait dit que plus le diagnostique de leucodystrophie tombait tôt, plus l’enfant dégénérait rapidement.
Nous avons alors été confronté à la plus grosse décision de notre vie : Un traitement de cellules souches existait pour la maladie de notre enfant, mais le remède prendrait du temps à se rendre jusqu’au cerveau pour arrêter l’évolution de la maladie, et durant ce précieux temps, notre enfant continuerait à dégénérer sans avoir de retour en arrière c’est-à-dire, tout ce que Louis perdrait comme faculté, il ne les retrouverait plus même après le traitement. On nous avait alors laissé une image d’un homme d’une quarantaine d’années à qui nous aurions eu à changer les couches, probablement aveugle, sourd, muet, gavé et qui malheureusement ne marcherait jamais ni même ne porterait son verre ou sa fourchette à sa bouche pour se nourrir des aliments à son goût…Les images se succédaient dans nos têtes : la fatalité nous frappait et nous ramenait à un homme qui ne pourrait s’épanouir qu’à travers nous, sa famille, à l’aide de quelques sons sourds et des battements de cils…
Nous avons alors regarder notre enfant qui était maintenant âgé de 6 mois et nous avons décidé de laisser faire la nature, de le laisser aller avec beaucoup beaucoup beaucoup d’amour et de le bercer jusqu’au ciel lorsque le moment viendrait…
Les mois ont passé et à force de vouloir rendre confortable notre petit garçon, papa et moi avons ouvert nos livres de biologie pour comprendre ce qui se passait.
On avait précisé que c’était une maladie de surcharge métabolique au niveau du lysosome… « Mais qu’est-ce que ça voulait dire?? »
En étudiant les mots, nous avons compris que le métabolisme c’est l’ensemble des réactions que subit le corps en s’alimentant et ainsi fournir à l’organisme tout ce dont il a besoin pour se maintenir en vie, se reproduire, se développer et répondre aux stimulis de l’environnement.
La maladie de Loo était due à une enzyme qui ne dégradait pas suffisamment les galacto-lipides qui s’accumulaient alors dans ses cellules sous forme de toxine appelée psychosine. Comme « rien ne se perd et tout se transforme » : des liens ont commencé à se créer dans nos têtes : Comment faire en sorte maintenant de prévenir la transformation, l’accumulation appelée psychosine, pour la maladie de Loo et avoir un peu d’espoir. L’espoir, c’est une façon de vivre et c’est un moteur incroyable d’actions.
Nous avons alors développé une alimentation restreinte en galacto-lipides. Attention ici, le galactose est une forme de sucre qui est contenu dans plusieurs aliments comme les tomates, le lait, les cerises, etc. Et les lipides, il y en a plusieurs sources : le poissons, les viandes, les noix, les huiles, tout est à étudier!
Avec l’aide des médecins qui suivaient Louis : nutritionnistes, diététiciens, généticiens, neurologues, etc, nous avons développé une diète à Loo qui lui a permis de retrouver la vue, les sourires et quelques facultés motrices mais surtout de cesser toutes les crises d’épilepsie! Un confort inestimable pour notre petit garçon.
En parallèle, nous avons retenu tous les exercices qu’offraient les inhalothérapeuthes, ergo, physio, psysiatre, opthalmo…qui rendaient Louis confortable encore une fois et nous avons créé une série d’exercices de stimulations qui fonctionnait avec lui pour son développement. En plus d’étudier les méthodes Masgutova, Vojta, Medek, Padovan et j’en passe pour l’éveil des réflexes primitifs… Nous appelions cette séries d’exercices « Lucky seven » à faire 7 fois par jour durant 7 minutes en l’honneur de la date de naissance de Loo, né le 7 mars et la différence d’âge avec sa soeur. L’adorable Jade nous suppliait de guérir son frère. Elle préparait ses repas, faisait les exercices avec lui. Elle était toujours prête à l’aider. Nous lui répondions que nous faisions de notre mieux lorsqu’elle nous suppliait de le guérir…et elle faisait aussi de son mieux. Nous faisions tous de notre mieux et nous sommes très unis par cette histoire, par notre histoire.
Dans un autre ordre d’idées, nous avons écrit à tous les spécialistes et chercheurs (très peu dans le monde) qui étudiaient les leucodystrophies. Chaque équipe de chercheurs travaille sur une leucodystrophie particulière. Ils font des rencontres annuelles afin de partager leur avancements. Dre Maria Escolar et Dr David Wenger sont les spécialistes de Krabbe, ils sont aux États-Unis. Je leur ai partagé tous les progrès de Loo et ils étaient très surpris par les vidéos et les photos que je leur envoyais.
En août 2015, Loo avait retrouvé la vue! Le sourire! Les sons perdus! Il se montait à 4 pattes seul! Il me faisait des grognements et des signes pour aller sur le petit pot! Il prenait des morceaux de casse-tête dans ses mains! Si on lui demandait de lever le bras, il faisait la commande, lentement, mais il comprenait…et nous l’alimentions par la bouche! Pour nous, il était sur la voie de la guérison!! De plus, il ne prenait AUCUN médicament et il ne faisait plus AUCUNE crise d’épilepsie!
Tous ces médecins restaient bouche bée sur cette montée spectaculaire. « Le ciel est bleu pour Louis, continuez ce que vous faites », nous disait-on.
Un des spécialistes de Loo avait suggéré une thérapie par oxygène et après avoir mis une vidéo en ligne pour un appel aux dons afin d’acheter une chambre hyperbare en septembre 2015, la famille d’un petit garçon aussi atteint de Krabbe en France, Ayden qui avait 2 ans, a voulu organiser un voyage au Canada pour en connaitre davantage sur cette thérapie que papa et moi avions présentée sur la petite vidéo. Nous organisions leur arrivée pour tout l’été 2016, et oui, vivre durant 3 mois avec des inconnus pour partager les détails de la thérapie qui rendait confortable Loo. La famille de France a organisé une levée de fonds sur plusieurs mois afin d’amasser la sommes qui leur permettrait de venir s’installer chez nous.
Nos amis français avaient commencé à appeler cela « Le Protocol de Loo » et de mon côté, je cherchais jours et nuits, une façon de prouver que l’alimentation profiterait à être partager aux autres enfants atteints de Krabbe.
La théorie était écrite et un jour d’avril 2016, l’équipe de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) nous a répondu que le Protocol de Loo méritait d’être étudié plus attentivement.
En cette même période, Louis était fragile. Nous venions de déménager dans une nouvelle maison et il avait de la difficulté à reconnaitre son nouvel environnement. Il avait 3 ans. Le nouvel environnement, l’excitation d’accueillir une famille à la maison et partager notre « découverte » rendait Louis anxieux…Il s’était mis à hyper saliver et comme sa déglutition n’était pas extraordinaire, il avait commencé à s’étouffer souvent lorsqu’il était fatigué et ce, jusqu’à en perdre conscience…Nous devions l’aspiré avec une machine pour éviter le pire.
La famille de Ayden est arrivée le 4 juin 2016, et 12 jours plus tard, Louis s’est étouffé durant sa sieste d’après-midi, le 16 juin 2016 entre 14h et 16h…
Vers 16h ce jour-là, mon coeur s’est serré, j’ai eu l’impression de l’avoir oublié dans sa chambre : habituellement j’y allais plusieurs fois. Je m’en veux encore…Je n’arrive pas à mettre par écrit cette journée affreuse, toutes mes excuses…
Je dois avouer que moi aussi j’étais très fatiguée… Aujourd’hui, je me dis que c’est peut-être le flambeau qu’il a voulu passer à son meilleur ami Ayden de la France…Je ne sais plus comment rationaliser son décès, vous m’excuserez.
Je me rappelle qu’en le berçant jusqu’au ciel, lorsqu’il s’éteignait tranquillement dans mes bras, dans son lit…je lui ai promis que je continuais, que j’allais mettre toutes mes énergies dans la poursuite du remède pour la maladie de Krabbe et les autres leucodystrophies.
Depuis son décès en 2016, j’ai fondé une fondation en son honneur soit La Fondation le tout pour Loo.
Vous pouvez nous suivre via Facebook : Fondation le tout pour Loo.
La mission de la Fondation est de soutenir les familles et briser l’isolement que ces familles peuvent ressentir avec un membre atteint d’une leucodystrophie et surtout, de faire avancer la recherche pour faire en sorte que les leucodystrophies deviennent des maladies graves et non des maladies mortelles!!
La première recherche que nous avons supportée est au laboratoire du métabolisme des lipides à UQAM, elle porte fièrement le nom : Protocol de Loo. En fait, c’est l’alimentation que papa et moi avons offert à Louis qui est étudiée dans ce laboratoire. Déjà, plus de 7 enfants dans le monde suivent le protocol et tous se portent mieux. Cette recherche est financée presqu’en totalité par l’Association Lueur d’espoir pour Ayden en France. Ce sont nos partenaires pour faire avancer les choses!
À force de vouloir m’impliquer dans la cause, on m’a offert un job super à l’Hôpital de Montréal pour enfants. Je suis devenue assistante de recherche de la neuropédiatre Dre Geneviève Bernard qui spécialise ses recherches sur les leucodystrophie dans son laboratoire au Centre Universitaire de santé McGill. Nous voulons faire en sorte que Montréal devienne la plaque tournante pour les patients atteints de leucodystrophies.
Le 16 juin 2018 dernier, deuxième anniversaire du décès de Loo, j’avais été mandatée d’organiser une conférence éducative internationale sur les leucodystrophies! Des conférenciers renommés présenteront sur les nouvelles et futures thérapies et des cliniciens offriront 4 journées de cliniques multidisciplinaires aux personnes atteintes d’une leucodystrophie : du jamais vu!
Le tout était organisé en collaboration avec la Fondation de l’Hôpital de Montréal pour enfants, la Fondation Lueur d’espoir pour Ayden, la Fondation Leuco Dystrophie, la Fondation Bethanys Hope et la Fondation le tout pour Loo!!
Ensemble, on va plus loin!
Je fais tout ça pour Loo et pour notre famille. C’est la grande soeur de Louis, Jade, qui a dessiné le logo de la Fondation (Le petit Krabbe bleu).
Je suis investie à 100% pour toutes les familles qui vivent ou ont vécu avec la leucodystrophie.
Une belle histoire d’amour qui continue….